Céleste Boursier-Mougenot pour le Prix Duchamp

L’an dernier, les éminents jurés du Prix Marcel Duchamp avaient à choisir entre trois artistes dont les oeuvres étaient présentées sur le stand de manière complète, entière, et un quatrième dont le stand n’était que la partie émergente d’un système, d’un processus. J’avais préféré ce dernier, et le jury aussi, lui décernant le prix 2009. En sera-t-il de même cette année ? Les stands de chacun des candidats sont à la Cour carrée, le lauréat sera annoncé demain à 11h, je m’empresse d’écrire, venant d’entendre les présentations des artistes au jury.

D’emblée, les dessins et tableaux d’Anne-Marie Schneider ne m’intéressent guère, non par opposition rédhibitoire au médium, non parce qu’on ne devine pas, derrière ces demi-personnages, jambes et troncs séparés, des histoires à raconter, voire des psychologies complexes, non parce que je ne reconnais pas ses qualités de dessinatrice, mais parce que je ne vois pas en quoi un tel travail ajoute quoi que ce soit à l’art, à son histoire. Qu’Anne-Marie Schneider ait des choses à dire et à exprimer, tant sur le plan du sujet que sur celui du dessin (et du dessein), c’est certain, mais je ne vois pas bien en quoi ça fait avancer le schmilblick.

henrot.1287767307.jpgCamille Henrot, elle, le fait avancer, mais dans une direction que je n’aime guère. Ayant récemment détesté son exposition à l’Espace Vuitton, j’ai au moins trouvé sa présentation ici plus sobre. Je ne suis pas assez compétent en ethnologie ou anthropologie pour savoir si son discours tient du lard ou du cochon, mais travailler sur un rituel du Vanuatu, sans doute inspiré du culte du cargo, devenu spectacle pour touristes, et ayant donné naissance au saut à l’élastique est intéressant : rencontre entre cultures, passage de témoin, déformation lors du passage, ce sont de bonnes questions, je trouve. Mais pourquoi donc Mademoiselle Henrot en fait-elle toujours trop ? Dans cette vidéo (titrée ‘Coupé-décalé’), on voit une coupure au milieu de l’image et on perçoit un très léger décalage entre les deux parties de l’image : l’artiste a découpé la pellicule verticalement, et l’a réassemblée avec un retard d’une seconde, afin de souligner à quel point ce rituel est rendu factice, a perdu de son authenticité. C’est lourd, comme l’est le radiateur en forme de carte marine à l’entrée (‘Tableau de navigation’). Si elle apprend la sobriété, si elle sait faire preuve d’économie et de simplicité, je commencerai à apprécier son travail. 

media_file_799.1287767320.jpgJ’ai découvert Cyprien Gaillard il y a trois ans. J’aime beaucoup son rapport à l’histoire et au paysage, ses effacements, qu’il recouvre de papier ou de peinture un tableau existant, qu’il remplisse un paysage de fumée (et je m’étais d’ailleurs un peu trompé lors de cette exposition à Marseille il y a trois ans) ou qu’il travaille avec des polaroïds dont l’image va s’effacer; j’apprécie aussi son intérêt pour l’architecture, pour les tours HLM. La vidéo qu’il présente ici (‘Dunepark’) montre son travail d’excavation quasi archéologique d’un bunker de la deuxième guerre mondiale dans un quartier de La Haye (avec l’aide de quelques engins de travaux publics; le bunker fut ré-enfoui ensuite, indestructible) : c’est une métaphore du passé historique que, faute de savoir traiter, on a enfoui, c’est un anti-monument. Face au déni d’histoire (la collaboration, longtemps, la guerre d’Algérie, encore aujourd’hui, ou, ailleurs, la Nakba), face à un monde qui enfouit son histoire, qui la cache, la travestit, cette vidéo est une protestation symbolique, une réappropriation que j’aime beaucoup. On peut toujours dire que Cyprien Gaillard est un peu jeune pour être consacré, mais ce serait, à mes yeux, un excellent candidat.

Mais, comme l’an dernier, il y a un candidat qui se situe, lui, sur un autre plan. Ce n’est pas ce qu’il montre, quelles qu’en soient les références, qui compte, c’est le processus de création de cette pièce et son inscription dans un réseau plus large. Céleste Boursier-Mougenot est un artiste qui a beaucoup travaillé sur la musique, non pas tant sa composition, mais sa découverte, sa révélation dans des lieux et situations incongrus : musique que génère l’entrechoquement de bols de porcelaine dans une piscine, musique que font des oiseaux se posant sur des cordes de guitare, musique qui nait de l’envoi d’un signal vidéo sur un ampli. Céleste détourne les instruments, leur fait faire autre chose que leur fonction officielle, programmée, il bâtit des Larsen cbm.1287767296.jpgsonores ou vidéo, des systèmes circulaires où le son généré par un phénomène influe sur ce phénomène même. On ne demande rien au spectateur sinon d’être là, d’être un motif, d’être, disait son présentateur cet après-midi, ‘interpassif’. À la Cour carrée, on voit quatre arbres en pots, des ficus je crois, montés sur des pots à roulettes, allant et venant sur le stand : leur mouvement dépend de leur besoin en lumière, en eau, en énergie pour les batteries, et on pourrait imaginer demain une transhumance d’arbres à roulettes dans nos avenues. Mais il y a aussi un processus second, non pas caché, mais à distance : le ‘spectateur’ peut aller sur le site transHumus et voter pour l’un des quatre candidats. Son vote n’a aucune importance et n’est même pas comptabilisé; mais les mouvements de la souris qu’il effectue en ‘votant’ sont des impulsions transmises aux arbres (chacun étant, de manière non identifiée, associé à l’un des candidats). Faites faire d’innombrables 8 à votre souris et un des arbres fera de même. En somme, derrière ce mécanisme complexe, ce qui compte dans le travail de Céleste Boursier-Mougenot, ce n’est pas tant la forme que nous voyons, le sentiment esthétique que nous éprouvons en regardant ou en écoutant, c’est la perfection du processus libéré du motif, du sujet, et c’est cela son oeuvre.

Nous saurons demain si le jury a fait preuve de la même ouverture que l’an dernier, puisque choisir Céleste Boursier-Mougenot c’est en quelque sorte ouvrir l’oeuvre sur un autre plan.

23 octobre : le jury a sagement éliminé les deux candidates, qui ne faisaient pas le poids, et son choix s’est porté sur Cyprien Gaillard, artiste plein d’espoir et déjà reconnu internationalement. C’est une inflexion sensible du Prix Duchamp que de saluer un jeune artiste en devenir plutôt qu’un artiste plus mûr et plus âgé. Certes, intrinsèquement, je trouve le travail de Céleste Boursier-Mougenot plus accompli, plus riche, plus multiforme; mais je pense que le jury a fait son choix à l’intérieur du nouveau paragdime qu’il semble s’être fixé : le Prix Marcel Duchamp comme booster de la carrière d’un jeune artiste. Rappelons l’âge des lauréats précédents au moment de leur obtention du prix : Afif 39 ans, Grasso 36 ans, Trouvé 39 ans, Mayaux 45 ans, Closky 42 ans, Benzaken 40 ans, Mercier 33 ans, Gonzalez-Foerster 37 ans, Hirschhorn 44 ans, soit près de 40 ans en moyenne, sachant qu’aucun d’eux ne fut un ‘late bloomer’. Ce n’est ni bien ni mal de couronner un (bon) artiste de 30 ans, c’est juste un changement de l’objectif du prix.

J’ai rectifié en incluant ici une oeuvre d’Anne-Marie Schneider faisant partie des oeuvres présentées sur le stand. La photo de TransHumus, de Céleste Boursier-Mougenot, est une photo d’écran faite par moi à la va-vite pendant la présentation. Mais je n’ai pas eu le temps de retourner Cour carrée pour faire des photos. Anne-Marie Schneider étant représentée par l’ADAGP, la photo de son oeuvre a été retirée du site dans un mois.

42 réflexions sur “Céleste Boursier-Mougenot pour le Prix Duchamp

  1. Un des noms du Livre dit :

    ayant dit que j’étais sensible à l’oeuvre de Céleste Boursier-Mougenot , et que a priori je ne voyais pas-mais c’est sur l ‘écran- de grnad intérêt à la première image, acceptez ce témoignage d’un agacement tout personnel ? l’argument devenu très, trop fréquent et actuel, dans tous les champs,  » je ne vois pas bien en quoi ça fait avancer le schmilblick. »…. m »agace..!!!
    Imaginez plutôt une oeuvre , ou quelques pièces seulement, dont on prouvera dans vingt ans qu’elles ont fait faire un bond à notre vision du monde, comme cela arrive en sciences et échappe parfois à son auteur même (selon qu’il ‘en discute ou non avec un tiers) mais qui vous ennuie profondément aujourd’hui ? Et alors ?

    J’aime

  2. BEW dit :

    Je suis un admirateur du travail de Celeste BM, mais je me demande si le prix Marcel Duchamp ne devrait pas plutôt encourager, et donc s’adresser à un artiste plus jeune. C’est une vraie question. Et je ne suis pas sur de la réponse. En tous cas, je partage votre point de vue sur les plus méritants!

    J’aime

  3. Vintage Plissken dit :

    Je pense que c’est Cyprien Gaillard qui obtiendra le prix Marcel Duchamp. Il a de la ressource. En plus il a le vent en poupe.

    Question subsidiaire : je rebondis sur les propos de LRouges :  » (…) ou qu’il travaille avec des polaroïds dont l’image va s’effacer; (…) « . Est-ce que quelqu’un sait (peut-être LR lui-même puisqu’il s’y connait bien en photo) où l’on peut encore se procurer des pellicules de polaroids 500 ? Je n’en trouve plus dans les Fnac. On me dit que la firme Polaroid n’en produit plus mais d’aucuns disent qu’on peut encore s’en procurer. Est-ce que quelqu’un peut me répondre ? D’avance, merci.

    J’aime

  4. Francois dit :

    et c’est donc Cyprien Gaillard qui, comme attendu, l’emporte. Bénéficiant déjà d’une petite renommée à l’étranger, c’est un choix assez logique et légitime.

    J’aime

  5. frederic dit :

    Cool C est Cyprien Gaillard qui l’emporte !

    C’est une très bonne nouvelle: les institutions et collectionneurs choisissent de booster un artiste français qui plaît déjà pas mal à l’étranger. Je salue cette nouvelle attitude qui cultive les assonances plutôt que les dissonances, et renforce la confiance en soi de nos jeunes artistes afin d’ aller commencer ailleurs pour mieux revenir vite.

    Je suis séduit par le temps court qui a pu permettre au Centre Pompidou (Alfred Pacquement) et à l’Adiaf de reconnaitre un artiste espoir sans attendre des années et sans faire la fine bouche en tenant des propos ringards et d’un autre temps

    Bravo !!! Formidable

    Mon second choix était effectivement Celeste BM mais après Cyprien Gaillard.

    J’aime

  6. frederic dit :

    Bourgeoisie branchée qui se légitime elle meme …?????????? (yvan)

    En choisissant Cyprien Gaillard qui travaille sur les utopies urbaines et en écartant Camille Henrot pour ses travaux « gros grain » de pauvre petite fille riche qui se sent coupable car papa dirige la banque Rothschild, et qui nous en fait des tonnes pour se déculpabiliser en montrant de l’anthropologie,je ne suis pas sûr que le jury ait choisi l’art bourgeois branché.

    J’aime

  7. artiste volontaire dit :

    Débat symptomatique ci-dessus,on parle de marché,d’export et…d’import (de l’artiste produit),c’est tout bon!C’est vraiment fin de règne et sans vergogne.Et ça veut faire aimer l’art,alors que l’information passe par la médiation galerie,musée,centre culturels divers…mais à quand des véritables visites d’ateliers,avec ou sans lunettes et sans le soucis constant de promotion commerciale.Est-on là pour » recruter » des artistes ou pour goûter un plaisir partagé de l’inédit?

    J’aime

  8. Vintage Plissken dit :

     » Je pense que c’est Cyprien Gaillard qui obtiendra le prix Marcel Duchamp.  » (Ecrit le 23 octobre à 00h46)

    On aura remarqué la pertinence de mon propos. Mais il suffisait d’être un tant soit peu au fait du monde des arts plastiques pour savoir que ce jeune plasticien, Cyprien Gaillard, a sacrément le vent en poupe depuis quelque temps et allait finir par être couronné par un prix prestigieux. on verra bien ce qu’il nous propose en 2011 à Beaubourg, espace 315, en espérant qu’il fasse mieux que Saâdane Afif, emberlificoté dans une  » esthétique relationnelle  » un peu datée. En même temps, soyons clairs, ce ne sera pas très difficile !

    J’aime

  9. frederic dit :

    Moi ce qui m’attriste c’est ce billet amer de LR à 1:03 du matin sur le mode français du « oui mais ».
    Un jeune artiste de 30 ANS qui gagne un prix important… oui mais

    Oui mais

    Oui mais

    Oui mais

    Oui mais

    …(…)

    J’aime

  10. Soyons clair et distinguons trois choses :
    – la qualité du travail de Cyprien Gaillard, que je reconnais pleinement (et ce depuis 2007, l’année où il a commencé à être connu), et je l’ai écrit dès le début;
    – la finalité du Prix Marcel Duchamp, soit reconnaissance d’artistes confirmés « d’âge moyen », soit accélérateur de carrière de jeunes artistes (comme le Prix Ricard) : on ne peut que reconnaître qu’il y a cette année un changement. On peut ensuite discuter si c’est une bonne chose ou pas, et, si on pense que ça l’est, on doit se demander quels seront désormais les vecteurs de reconnaissance disponibles pour les artistes de la génération Saâdane Afif ou Philippe Mayaux si le Prix Duchamp ne leur est plus destiné. C’est ce que j’ai écrit ci-dessus;
    – la notion de « vent en poupe », c’est à dire de buzz marketing, mise en avant par un commentateur. Je ne crois pas que ça ait été un facteur important de décision, mais je n’en sais rien. Et si ce fut le cas (comme le suggérait ce commentaire auquel je réagissais), c’est seulement à cause de cette dérive marketing que je suis attristé, voire amer, pas sur le reste.

    J’aime

  11. Francesco Sinibaldi dit :

    The bridge of the darkness.

    In the dust
    there’s a ray
    of light and
    the first feeling
    of a sadness,
    and there, in
    your eyes,
    there’s a delicate
    movement…

    Francesco Sinibaldi

    J’aime

  12. Vintage Plissken dit :

    Retour sur mes propos : Cyprien Gaillard  » a le vent en poupe « , j’ai écrit ça et je le maintiens. Je pense que le bon buzz le concernant a été un élément parmi d’autres. A la Cour carrée, j’ai croisé par exemple, 2 ou 3 jours avant la remise du Prix, une fervente admiratrice de son travail. Comme s’il avait déjà une sorte de  » fan club  » all over the world servant sa cause.
    Maintenant, j’ai aussi écrit :  » il a de la ressource  » . Et je le pense toujours. Son travail autour des ruines, se penchant sur une lecture sociologique de sites urbains et autres à l’abandon, et l’utilisation du médium peinture pour revisiter la peinture de paysage sur un mode critique et  » touristique  » me semble intéressant ; il touche un médium en ayant une pensée de côté, l’air de ne pas y toucher. C’est assez élégant comme geste (mais il faudrait creuser, je suis loin d’être spécialiste de son travail). Concernant Céleste Boursier-Mougenot, l’artiste, il me semble, depuis une dizaine d’années, propose à peu près les deux mêmes pièces, dont l’une fort connue : les oiseaux qui font de la  » musique  » en venant se percher sur des guitares. L’oeuvre est belle, poétique, itou itou. A la Cour carrée, les visiteurs – et visiteuses – étaient nombreux pour regarder la vidéo diffusée sur écran plasma montrant les  » traces  » visuelles de son installation vivante. Mais quid à part ces deux pièces (+ les bols de porcelaine dans une piscine) ? Céleste Boursier-Mougenot, j’attends qu’il montre autre chose.

    Enfin, dernière chose, je connais pas bien les propositions des deux candidates nominées. Malgré tout, précisons que le Prix Marcel Duchamp n’a pas manqué de revenir ces dernières années à des femmes : Trouvé, Benzaken, Gonzalez-Foerster. Affaire à suivre…

    J’aime

  13. d'T ela dit :

    c’est quoi tout ce rata ?
    VOUS POUVEZ ÊTRE SÛR D’UNE CHOSE, C’EST QUE MOI CÉLESTE ET CYPRIEN, JE LES CONFONDS.
    Triste spectacle de l’info frelatée faite par des individualités scotomisées.
    Des demi-artistes sur lesquels se chamaillent des demi-intellos. Les uns nous pondent des machins les autres font preuves de bêtise. Les uns comme les autres, je vous oublie, vous n’atteignez plus rien avec vos recettes. Depuis une décennie par exemple, allons-y, célébrons là cette année de 21ème S., regardons bien ce qui s’y passe en regard du prestige de notre Marcel Duchamp, posons les cartes sur la table et mettons en face quelques petites phrases bien senties que nous communiqua le grand homme à l’orée de sa vie puisque que vous faite fit de la notion de grand-oeuvre.

    C’est pas compliqué tout de même, les retours aux fondamentaux parce que j’ai le sentiment qu’à force, se sont les snobs sans manières qui nous gavent leur service à nous mélanger les torchons et les serviettes. C’est donc pas à jamais d’emportements que d’excuses !
    Manque de pratiques réelles, trop peu de savoir réel, épanouissements chimériques, etc.
    Cf. mes others posts et je l’avoue : je suis un bavard, j’écris qu’à moitié et je vous aime bien quand ^m

    J’aime

  14. frederic dit :

    Oui mais…

    Oui mais…

    Oui mais…

    Tout ça me rappelle « computer says no » de Little Britain (BBC).

    Un petit quizz pas bien méchant pour Mr LR :

    Mr LR que faites vous quand vous appelez votre blog Lunettes Rouges et chaussez des lunettes rouges ?

    2.Est ce que cela dénature vos propos ?

    Réponses:

    Vous faites une présentation de vous même, créez un personnage reconnaissable et attribuable, vous créez une marque Lunettes Rouges et travaillez votre espace propre dans l’univers des critiques d’art.
    Cet identifiant vous attire des gens qui se reconnaissent en votre démarche ou vous suivent: à l’exemple de Vintage Plissken ou de moi et tant d’autres.
    Assez de finasseries et de périphrases: vous faites du marketing.
    Non ça ne remet pas en cause votre démarche de critique d’art et vos opinions. Ce que vous dites est ce que vous pensez des oeuvres et des expos.

    Le fait que vous ayez créé un label LR identifiable est un acte de communication dans un monde moderne qui sert à ce que vos efforts, votre énergie, et vos opinions sortent dans un univers globalisé de robinet à informations, images, sons, blablas, totalement saturé.
    Avec votre marketing, vos opinions sortent de la confusion, sont identifiables et servent à la réflexion et au débat.

    Revenons à votre fin de billet que je trouve triste et complètement contradictoire avec vous même:

    « la notion de “vent en poupe”, c’est à dire de buzz marketing, mise en avant par un commentateur. Je ne crois pas que ça ait été un facteur important de décision, mais je n’en sais rien. Et si ce fut le cas (comme le suggérait ce commentaire auquel je réagissais), c’est seulement à cause de cette dérive marketing que je suis attristé, voire amer, pas sur le reste.c’est seulement à cause de cette dérive marketing que je suis attristé, voire amer, pas sur le reste »

    ET ALORS ?

    Qu’un jeune artiste qui a quelque chose a dire sur l’histoire de l’art et sur son temps (la ruine des utopies urbaines confrontées au classicisme historique: Cyprien Gaillard) soit relayé voire utilise le buzz marketing pour faire valoir et distinguer sa proposition artistique auprès des institutions et collectionneurs n’invalide en rien sa démarche.
    Qu’il réussisse à 30 ans est réjouissant.
    Qu’Alfred Pacquement , Gilles Fuchs et les autres membres du jury ne se soient pas senti « vexés » par ce buzz est également réjouissant: ils ont fait preuve de discernement: ils n’ont pas invalidé la démarche de Cyprien Gaillard parce qu’un buzz s’était créé. Tant mieux. Cet artiste est important.

    Vivons avec notre temps et pas avec un mental de vieux: l’artiste romantique du 19e façon Chatterton ou Courbet est mort. On ne vit plus avec des pigeons voyageurs et des artistes qui se morfondre à attendre sous la mansarde que quelque chose vienne à eux.

    Nous sommes au 21e siècle et les artistes vivent avec leur temps:
    c’est leur rôle de nous faire voir ce que nous ne voyons pas dans le monde qui nous entoure,
    C’est aussi leur professionnalisme d’utiliser les moyens de leur temps (internet, marketing) pour faire émerger leur proposition artistique dans un magma d’images et tant mieux si elle a une réponse via ce qu’on appelle dédaigneusement du « buzz ».

    Oui mais

    Oui mais

    Oui mais

    Oui mais….

    J’aime

  15. frederic dit :

    Pour Gustave Courbet, je pensais à son oeuvre de 1843 « Le désespéré (autoportait) »

    Voir l’excellent livre l’Art de la Folie de Sophie de Sivry et Philippe Meyer dont il fait la couverture.

    Sinon je pensais aussi à l’oeuvre d’Henry Wallis, « Chatterton » 1856.

    J’aime

  16. Versubtil dit :

    Oui,ce Courbet, en a beaucoup fait pour faire parler de lui…Jusqu’à l’histoire de la colonne!Le scandale il aimait ça.
    Mais pour revenir au petit génie de trente ans,s’il a tout ce qu’il veut,attendons un petit peu.Achetez des pièces de son travail.
    Chaque artiste à chaque époque à pris les moyens plus ou moins efficace qui correspondait à son tempérament.Mais c’est toujours le contenu qui compte.Les artistes « à la mode »ont toujours existé et l’histoire en a retenu pas mal et en a oubliés beaucoup d’autre!

    J’aime

  17. frederic dit :

    Effectivement la mode passe, et nous verrons dans 10 ou 20 ans.

    Mais en son temps (années 80), le MNAM avait refusé une oeuvre de Basquiat parce que c’était « la mode » disaient ils…

    Cette fois ci ce genre de prétexte ne l’a pas emporté, permettez moi d’en être très heureux pour l’artiste et son oeuvre et aussi pour le MNAM dont Alfred Pacquement me semble incarner quelqu un qui essaie de faire corps avec son temps.

    Enfin, je préfère la mode au risque de se tromper à « oui mais », cette incapacité à jouir de ce que la vie apporte de bien, trait devenu dominant dans le mental de notre pays.
    Comme le disait l’artiste Wik Muniz : « La première personne dans une pièce qui ouvre la bouche pour se plaindre est toujours un français ».
    Je préfère « Yes, we can » à l’éternel « oui mais »…

    De l’air ! De l’air ! De l’air !

    Bravo à Cyprien Gaillard et au jury du Prix Marcel Duchamp, étonnez nous encore !

    J’aime

  18. Versubtil dit :

    Il y a pas de problème,achetez de l’art contemporain,c’est dans l’achat qu’il y a risque,la muséification,surtout en France,vous le savez bien,c’est l’achat public.Pour ce qu’il s’agit de Basquiat on est très heureux pour ses acheteurs de la première heure!Pas besoin de prix ni de breloque en chocolat pour lui!Vous voudriez que l’officialité confirme votre investissement financier.Vous voulez le beurre,l’argent du beurre et peut-être le reste!Des excellents artistes à la mode ça existe,c’est ce que j’exprime lors de ma dernière intervention sur ce blog.

    J’aime

  19. frederic dit :

    @LR

    Faisons confiance aux artistes: Cyprien Gaillard n’a pas forcément la même personnalité que Loris Greaud. Nous verrons… sans amertume. C’est justement ça qui est interessant pour moi et pas de se poser mille problèmes de « marketing interferance ».

    @ Versubtil

    Je ne veux ni le beurre, ni l’argent du beurre car je n’ai pas de Basquiat dans ma collection hélas mais je ne le vendrai jamais si j’en avais un. J ai beaucoup de jeunes artistes (pas de CG néanmoins), des français et des autres, et aussi des confirmés et mes choix sont guidés par une quête personnelle.

    Pour moi la mode n’est pas un critère négatif, je dois donc dire la même chose que vous, sauf erreur. Je raconte juste comment le MNAM a raté un Basquiat dans ses collections par rejet de « la mode » à l’époque (fin des années 80) où il ne valait pas beaucoup d’argent.

    Je ne suis pas un fan des institutions mais je pense tout de même que le soutien du Centre Pompidou est un atout positif pour un jeune artiste qui n’a pas attendu ça pour exister.

    J’aime

  20. d'T ela dit :

    @ frederic un cadavre exquis, pourquoi pas ?

    Et Montagne-Russe tant qu’on y est, alors allons-y :
    un jeune artiste qui n’a pas attendu ça pour exister.
    + et il a déployé quels genres de moyens pour exister, carburer avec des gens qui s’imaginent être le comburant d’idées sommes tout peu abouties mais en fête.
    Regarder Loris, Laurent, et on peut allonger la sauce, on peut aller voir ce qui se passe hors de nos frontières outre-Rhin, outre-Manche, transatlantiques, trans-pacifiques, les martien dans la mode du productivisme captalistico-entrepreneurial. Et tout ce petit monde fait des tournantes, les uns s’essoufflent, d’autres encore, et tiens avions oublié lui, et machin aussi c’était pas mal, etc. Si je dis que moi je les confonds, c’est parce que c’est mon cerveau qui veut pas, et combien d’autre inter-changeables.

    Se diversifier dans d’autres registres, dans d’autres pratiques :
    Il fait du cinéma… ah bon, David le Lynch dans son dernier film « Inland Empire » n’est-ce-pas alors multiplié par le fantôme de Marcel Duchamps à la puissance 4. Et la monteuse se prends la tête, la dir.prod, les machinos, etc…
    Musique et son, pourquoi pas : j’en profite pour dire que le défilé Arto Lindsay + RIRKRIT TIRAVANIJA & ARTO LINDSAY à Belleville fut pour nous public présents et défilants une expérience vivifiante pour cette nuit Blanche ravivée.
    Euh, oui, sérendipitons encore sur des musiciens des vrais. Mais c’est de la pratique de magie, c’est pas des bandes-sons de pub light-french-touch recyclées et puis quoi encore. Pour commencer à faire des beaux ronds, des belles boucles ? Un musicien professionnel qui sait pas jouer, qui sait pas lire, pas composer, pas curieux, pas éclectique, pas ringard, pas décalé, pas original, pas doué, pas travailleur, sans imagination, sans finesse, sans esprit, sans culture. Cf mon post en sept. sur les minaret SWiS avec mon avis sur SC3.
    Quoi d’autre encore, des bouquins, encore des bouquins, pas écrire, non lire simplement. Et puis faire des zigzags, des ricochets, s’immerger et prendre le temps de s’instruire, de maîtriser ses savoirs fins. Et si le tout dans sa globalité ne fait pas penser à l’atanor filosofal, s’en est trop attendez, l’inconnu. Des artistes maudits, des poètes romantiques allemands comme Hölderlln, des universitaires -> sentences grecques et latines (trop gros bouquin vu ce matin en vitrine rue des Écoles). La Haute-antiquité alors, l’Empire Gallo-Greco-Romain, les empires nomades (avec un e minuscule)

    Attendez, attendez, ici c’est le Monaco Yacht Show. Désolé on ne passe pas.

    Maintenant : crash cranes sur you tube, Liebherr internet website, avec avec la physiologie environnementale expliquée par un scientifique tout à l’heure à la radio. Tiens une idée qui passe …

    le 11 nov. dans qq semaines, le 2011 sept. de l’année prochaine 39 40 23 18
    merde l’année prochaine, déjà et Notre Vénérable Nuage Céleste il en pensera quoi de cette proposition de partenariat à BB . Et Paul Claudel en vidéo INA  » …les artistes maudits… « , le mois dernier en deux mots. ÉMOUVANT, bonne soirée, C’EST DUR NOUS SAVONS BONNE NUIT et peut-être à demain

    J’aime

  21. d'T ela dit :

    et bien non, vous vous trompez sur mon esprit. Et tiens tout ces jeunes plein d’avenir, un petit tour de montagnes russe, bifurcation, et on arrive chez les vieux : par exmple vu que ça interresse tout le monde, ces grands expérimentés de la vie fascine, prenons WS Burroughs « Les Terres Occidentales », au début du son monument, il écrit quoi Bill ?
    Et WB Yeats, il écrit quoi le jour d’avant sa fin ? et combien d’autres monuments de l’Empire, rien que ces classiques du 20ème S.

    Je fais des efforts mais les articles, et puis les revues, et puis les presses universitaires, me tombent des mains. Médaille d’or cette année, le catalogue de l’année prochaine, enseigner, being a con Sultan « Suivre les chemins du land art -> zones désertiques en descendant l’ascète: pan pour l’un ; l’autre ouït un son Alors, du buzz dans un monde d’égoïstes : massacrer l’humain/paraître + le cameraman

    Ils se valident entre eux : toi t’imagine Des trucs qui me « surprennent » et moi j’organise Les machins ; objectif je me place dans l’histoire en fête! . Non, petite gloire et il faut souhaiter bonne chance pour les Grands Équilibres.
    La vraie vie subjective n’est pas une paire de manche et il suffit pas de se décider et de s’y mettre tendrement, laisser mûrir la vie et ça donne « ça » chez moi. OM

    *Cf. LR for morts details

    J’aime

  22. Vintage Plissken dit :

     » Je raconte juste comment le MNAM a raté un Basquiat dans ses collections par rejet de “la mode” à l’époque (fin des années 80) où il ne valait pas beaucoup d’argent.  » (Frederic).

    Hum, pas seulement par dédain de  » la mode  » mais aussi et surtout, cf. Richard Rodriguez collectionneur militant de Basquiat, par  » racisme culturel « .

    Heureusement, le Basquiat de Beaubourg est un chef-d’oeuvre, tant au niveau formel qu’à ce qu’il renvoie – l’esclavage, la ségrégation, la place des Noirs (sport, jazz) dans la société américaine – mais on n’en a qu’un ; avec un 2e, il est vrai, appartenant aux collections permanentes du Musée Cantini à Marseille. Deux, ça fait peu, alors qu’on parlait déjà beaucoup de Basquiat fin 80 en France, puisqu’exposé notamment chez Yvon Lambert ou chez Templon, galeriste parisien de Warhol. Vraiment dommage.

    Mais, avouons-le, il est toujours facile de réécrire l’Histoire après coup. Le retrospectif étant bien plus aisé, et surtout moins risqué, que le prospectif…

    J’aime

  23. m*m dit :

    L’exposition à Pompidou, voilà le véritable enjeu de ce prix. Il me souvient que Carole Benzaken avait été extrêmement critiquée pour une exposition jugée décevante à l’époque, et cela a marqué un terrible coup de frein à sa carrière, presque une régression. Il lui a fallu plusieurs années et l’estime réaffirmée de ses meilleurs soutiens pour s’en remettre (et encore). Mayaux avait surpris tout le monde par une exposition exceptionnelle donnant la meilleurs place à sa sculpture et il a donc pu tirer toute le bénéfice de ce prix (en terme de prestige). Bref, Cyprien Gaillard a intérêt à ne pas se rater s’il ne veut pas que ce prix soit pour lui une sorte de touché-perdu. (J’aurais voté Céleste aussi mais bon, nous ne sommes pas membres du jury et Cyprien c’est bien).

    J’aime

  24. Vintage Plissken dit :

     » Il me souvient que Carole Benzaken avait été extrêmement critiquée pour une exposition jugée décevante à l’époque, et cela a marqué un terrible coup de frein à sa carrière, presque une régression. Il lui a fallu plusieurs années et l’estime réaffirmée de ses meilleurs soutiens pour s’en remettre (et encore).  » (m*m)

    Assez d’accord avec vous mais je vois encore plus simple : depuis une dizaine d’années, Benzaken ne produit rien de passionnant. Il suffit de passer dans la galerie Obadia pour se rendre compte que ses productions sont faibles, tant sur le plan pictural que sur le plan spirituel. On attend un sursaut d’elle mais rien ne vient. Mais c’est aussi la difficulté d’être artiste. Comment rester productif tout en se diversifiant et en gardant une qualité générale à son travail ? Pas facile. N’est pas Picasso ou Basquiat qui veut.
    Concernant l’autre artiste, j’avais trouvé que la… mayaunaise avait pris à Beaubourg. Certes il y avait une surcharge pondérale (un peu trop d’oeuvres) mais cette générosité vaudra toujours mieux que le vide intersidéral, surtout quand celui-ci n’est pas la visée ultime – car je garde un très bon souvenir de l’expo du Vide à Beaubourg d »il y a deux ans je crois ; c’est une expo RADICALE qui avait été décriée dans la presse, notamment par un certain Comte-Sponville, ce qui est, soit dit en passant tout à fait bon signe !!
    Souhaitons à Cyprien Gaillard qu’il s’en sorte dans l’antre de Pompidou. Pas évident de trouver une place dans cette immense tuyauterie pop. Godard ou Orozco, convaincants ? Hum, pas facile, vraiment.

    J’aime

  25. temp dit :

    Il est navrant de voir que peu de gens connaisse vraiment Cyprien Gaillard… artiste le plus hype de l’année qui a semble t’il tout gagné.
    Le problème ici est que Cyprien Gaillard est aussi un fils a Papa élevé franco-américain (argument reproché à Camille Henrot) héritié d’une grosse fortune industrielle américaine, elevé en Suisse résident à Berlin :). S’agissant des pièces présentés pour le prix j’ai préféré de loin le travail de Camille et de Celeste… on verra bien qui restera dans la durée car la hype ca tourne c’est bien connu.

    J’aime

Laisser un commentaire