Trois photos d’André Kertész

à la Maison Européenne de la Photographie, jusqu’au 31 Décembre.

Est-ce une expo d’art, ou est-ce une expo sur l’art ? Je m’explique. Il y a trois photos de Kertész:

Kertesz La fourchette

  • une fourchette, toute simple, sur le bord d’une assiette, avec son ombre, le dépouillement même (photo de 1928);
    kertesz distortion 6

  • un nu déformé dans un miroir, femme devenue chimère (photo de 1933, sur une commande d’une revue « coquine »);
    Kertesz chez mondrian

  • une photo très composée du studio de Mondrian et du palier, avec un jeu savant d’ombre et de lumière, de droites orthogonales et de courbes (photo de 1926).

Trois belles photos, mais le propos de l’exposition n’est pas là. Il est de montrer comment ces trois images ont été tirées, recadrées (pour le Nu Distorsion), modifiées (quant au format et au support), montrées, diffusées, exposées, reconnues, critiquées, oubliées, redécouvertes, vendues (jusqu’à $400 000) et comment elles ont acquis une valeur iconique au fil du temps. L’exposition aligne donc, période après période, des tirages, des revues, des catalogues, des articles, elle juxtapose des formats différents, des médiums différents (tirage sur verre en particulier, mais aussi divers types de papier). La photo Chez Mondrian est de loin la plus représentée, plus de 50 fois, la plus commentée aussi: un plus savant que moi pourrait faire une étude historique de la manière dont les critiques en parlent depuis 80 ans.

A la fin, on s’interroge : qu’est ce qu’une photo ? ou plutôt, comment appréhendons-nous une photo , comment notre vision, notre plaisir, notre découverte sont-ils modifiés par le médium, le contexte, la situation ?

Par ailleurs, vous pourrez voir à la MEP une exposition très didactique sur le magazine VU. Vous y apprendrez la différence entre l’héliogravure et la similigravure, c’est dire ! Parmi les nombreuses photos de presse présentées là, une petite photo jaunie, pas très lisible (on devine des affiches déchirées au sol), a pour légende « Dans un cinéma parisien, on a manifesté contre un film surréaliste. La police n’a pas rétabli l’ordre. »

Et, au sous-sol (Mutations 1) , dans le cadre du Prix Alcatel de la Photo, de belles photos du lauréat, Philippe Ramette.

Photos provenant du site de la MEP ou de celui de la galerie Stephen Daiter.