Notre monde brûle : comment résister ?

Francis Alÿs, Sans titre (Migrant / Tourist), 2007-08, crayon, peinture à l’huile et ruban à masquer sur papier calque

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L’exposition « Notre monde brûle » au Palais de Tokyo (jusqu’au 17 mai), conçue par Abdellah Karroum, directeur du Mathaf, me réconcilie avec ce lieu, dont la programmation est, à mes yeux, trop souvent, à la mode, ésotérique et coupée du monde. Oui, notre monde brûle, au propre (Australie, Amazonie, …) comme au figuré (migrants, dénis de démocratie, …) et nous tentons, à tâtons, en désordre, d’y résister (combats écologiques, printemps arabes, luttes pour la justice sociale, prises de conscience postcoloniales, …), sans nous laisser distraire par de vains épouvantails (faites votre choix, il en est tant). Cette exposition inclut 34 artistes, la plupart (28) venant du (ou liés au) monde arabe (20 : Maroc, Egypte, Algérie, Qatar, …) ou musulman (Turquie, Iran), ou de pays du Sud (Inde, Viet-Nam, Ghana, Nigéria, Congo). Mais j’ai souhaité démarrer avec Francis Alÿs, belgo-mexicain et citoyen du monde, qui évoque dans le catalogue son expérience en 2016 avec un bataillon kurde dans le nord de l’Irak, et qui propose ici une pièce très réflexive sur les divisions, les oppositions, les frontières. Peut-être est-ce de ces schémas qu’il nous faut partir pour savoir de quel côté nous sommes, pour distinguer l’essentiel du secondaire et pour nous préparer au combat. Ce sont une vingtaine de peintures cartographiques sur papier calque, disposées sur une table rétroéclairée comme pour un briefing de campagne, toutes composées d’une terre jaune, d’une terre verte, et d’un océan bleu qui les entoure; et sur chacune, est inscrit un doublon : Known / Unknown, Open / Closed, Leave / Return, Us / Them, Real / Imaginary, Migrant / Tourist. Les migrations et les frontières, certes, sujet dont il est familier, mais aussi la complexité du monde, les exclusions et les différences.

Monira al Qadiri, OR-BIT, 2016, sculpture en impression 3D en lévitation, 20x30x20cm (à l’arrière plan : Sammy Baloji, ST, 2018, douilles d’obus et plantes d’intérieur)

Autre oeuvre induisant réflexion, celle de la Koweitienne Monira al Qadiri, qui réalise des bijoux pétroliers faits de perles iridescentes; celle-ci lévite au-dessus de son socle. Venant d’un pays dont l’économie a connu une folle croissance depuis un demi-siècle, l’artiste, consciente des enjeux écologiques et politiques, propose des oeuvres à la fois ancrées dans l’histoire et visionnaires, un questionnement de la folie de pouvoir et de richesse qui s’est emparée de notre monde. J’ai d’ailleurs été frappé par la qualité des artistes venant du Golfe dans cette exposition, trop peu connus en Occident : outre cette Koweitienne, il y a trois Qataris, Bouthayna al Muftah et ses performances calligraphiques historiques, Sophia al Maria et son tétrapode de science-fiction, et, seul homme du lot, Faraj Daham et ses portraits de travailleurs immigrés. Contrairement aux idées reçues (ou colportées) sur leur pays (par ailleurs patrie d’Al Jazeera et en butte à l’hostilité de ses voisins saoudien et émirati), ils n’hésitent pas à en questionner la structure sociale et les mécanismes de pouvoir.

Asli Çavuşoğlu, Le lieu de la pierre (détail), 2018, fresque sur panneau en aerolam, 125x125cm chacun

L’histoire est, pour plusieurs artistes, le moteur même de leur travail. Ainsi l’artiste turque Asli Çavuşoğlu revisite l’histoire du lapis-lazuli, minerai bleu venant d’Afghanistan, de la mine Sar-e Sang, c’est-à-dire le lieu de la pierre, pigment précieux dans l’histoire de la peinture jusqu’au début du XIXe siècle (et, plus récemment, source de richesse pour les Talibans). Bleu négligé dans l’Antiquité, bleu marial et royal à partir du milieu du Moyen-Âge, bleu moral de la Réforme, bleu horizon, bleu du drapeau européen (il faut relire Pastoureau), bleu Klein (évoqué ici par de discrètes anthropométries), la grande fresque de Çavuşoğlu décline cette archéologie du bleu.

Amina Menia, Foot de Libération Nationale, 2019, installation vidéo et diapo sur 3 écrans, capture d’écran partielle

Voici une pièce qui m’est chère, pour des raisons toutes personnelles : jeune Stéphanois de dix ans un peu footeux, j’avais vécu comme un coup de tonnerre la disparition de Rachid Mekhloufi de l’ASSE et sa réapparition quelques jours plus tard comme capitaine de l’équipe du FLN. L’artiste algérienne Amina Menia a interviewé Mekhloufi, et, en parallèle, l’écrivain Slimane Zeghidour ; avec quelques photos d’époque, elle présente son installation Foot de Libération Nationale : le football comme élan populaire et outil de cohésion, d’appartenance, comme instrument de création d’un mythe national, comme échappatoire social. Une oeuvre documentaire et questionnante, simple, mais forte.

Michael Rakowitz, reproduction d’un astrolabe du XVIe siècle, ex Musée de Damas, 15.3×2.5cm

Michael Rakowitz, dont la mère est Irakienne, a beaucoup travaillé sur le pillage et l’appropriation, en particulier lors de l’invasion de l’Irak par les Américains. Il a reconstitué ici des objets d’art des musées syriens et irakiens qui ont été volés ou détruits; ces objets sont faits avec des emballages alimentaires et du papier journal, mêlant copie, simulacre et, en quelque sorte, arte povera. Ce questionnement autour du pillage des oeuvres d’art, ici représenté de manière visuellement frappante, rejoint les réflexions d’Ariella Aïsha Azoulay que je relatais il y a peu.

Amal Kenawy, Silence of the Sheep, 2009, vidéo, capture d’écran

Une des pièces les plus dérangeantes ici est celle d’Amal Kenawy (artiste égyptienne décédée en 2012, dont je parlais en 2008) qui, outre une maison faite de bonbonnes de gaz dans laquelle on pénètre avec un peu d’appréhension, montre une vidéo, Silence of the Sheep, où elle fait ramper une vingtaine d’hommes dans les rues du Caire : elle se fait interpeller par des Cairotes à plusieurs titres, comme femme commandant à des hommes rampants, comme bourgeoise payant des prolétaires pour ramper, comme artiste faisant un art incompréhensible au commun des mortels, et comme Egyptienne donnant une mauvaise image de son pays. Et tout cela n’est pas si faux … Seule autre artiste décédée ici, égyptienne elle aussi, la merveilleuse peintre Inji Efflatoun, emprisonnée quatre ans sous Nasser, et sa mariée libanaise au fusil.

Bady Dalloul, A Country Without a Door or a Window, 2016-2019, détail d’une série de 200 dessins au stylo noir, feutre et crayon de couleur sur bristol, encadrés dans des boîtes d’allumettes, chacun 4.1×2.7cm

Bien d’autres oeuvres encore : des photographies d’Egyptiens par Shirin Neshat, des portraits de réfugiés syriens par Mounira al Solh, des petits dessins de réfugiés dans des boîtes d’allumettes par Bady Dalloul, des fragments de la Statue de la Liberté par Danh Vo, une installation vidéo sur six écrans de John Akomfrah (vue à Berardo il y a peu), des câblages de Mounir Fatmi, des fleurs dans des douilles d’obus par Sammy Baloji, les souffles mystiques de Younes Rahmoun, l’oeuvre brute de Khalil el Ghrib, les machines solaires d’Yto Barrada, et l’installation spectaculaire de Wael Shawky occupant tout le sous-sol. Quelques bémols : une fois de plus Kader Attia ne s’est pas foulé, avec une pyrogravure de croissants musulmans et d’étoiles de David, simpliste et bâclée; et on se demande vraiment ce que la maison autonettoyante de Dominique Hurth vient faire ici : rien à voir avec la thématique, et, s’il faut faire preuve de féminisme, les 15 autres artistes femmes ici présentes l’ont fait de manière bien plus pertinente et intelligente. A noter que le catalogue, outre la présentation des oeuvres, comprend un petit texte de la plupart (24) des artistes exprimant leur réaction au monde qui brûle, certains de manière très émouvante.

Nicolas Daubanes, Hôtel de Ville 1871, 2019, poudre d’acier aimanté

Inspiré par cette exposition revigorante, on peut ensuite aller voir la salle dédiée à Nicolas Daubanes (lauréat du Prix des Amis) : révolte, enfermement, résistance, dessins communards à la limaille de fer, poèmes d’Akhenaton, et une petite guillotine à la lame faite de dents. Par contre, on peut passer vite chez Kevin Rouillard (lauréat du Prix SAM), assez banal. Quant à Ulla von Brandenburg, seule l’entrée vaut la peine, en traversant les tentures percées d’un trou circulaire; le reste, et en particulier son film, est assez ennuyeux, creux et décevant, par rapport à ce qu’elle avait montré précédemment au Prix Marcel Duchamp et à Villeurbanne. La malédiction du PalTok ?

Photos de l’auteur excepté les n° 2 & 6.

Camille Henrot au Palais de Tokyo

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Je m’étais d’abord dit que je n’allais pas écrire d’article sur cette exposition, préférant garder mon venin pour les cas où on peut critiquer les choix politiques et esthétiques (par exemple Womenhouse, article dans quelques jours) plutôt que simplement déplorer le vide comme ici. Et puis, la demande populaire unanime (enfin presque …) a été que je transcrive dans ce blog mon commentaire sur FB, lequel est donc repris ci-dessous :

« Un bric-à-brac d’objets sans intérêt et de concepts à la mode, entouré par de la mauvaise peinture bien vulgaire. » Voilà.

(c) Camille Henrot 2017; (c) ADAGP Paris 2017. Conformément aux règles de l’ADAGP, les photos ont été ôtées du site à la fin de l’exposition le 7 janvier 2018.  Photos de l’auteur

De l’immortalité

David Fathi, Sans titre (route et cellule HeLa), série Le Dernier Itinéraire de la femme immortelle, 2017.

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On commence à Arles, avec l’installation photographique et musicale de David Fathi : des cellules de la tumeur cancéreuse d’une femme noire américaine, Henrietta Lacks, morte en 1951, ont été prélevées contre son gré, sans informer ses descendants, et ont été à l’origine de nombreuses cellules utilisées pour la recherche dans des laboratoires de biologie. Or ces cellules cancéreuses sont immortelles : si on les laissait prospérer, elles recouvriraient en trois mois la terre entière. Un biologiste a même estimé qu’il s’agissait là d’une espèce nouvelle, différente de l’espèce humaine. Fathi explore cette histoire en suivant la route menant de l’hôpital Johns Hopkins jusqu’au cimetière où cette femme est enterrée, tout en fournissant maintes informations sur cette histoire (y compris tous les artistes qui se la sont appropriée, sans respect pour sa famille : Pierre Huyghe, David Altmejd, Vik Muniz,…) et en mettant en perspective le racisme et la ségrégation en face de cette appropriation biologique. C’est un obscur labyrinthe, ponctué de photographies très sombres sur lesquelles se détachent des images de tumeur. L’élément le plus marquant est sans doute que, à l’approche du cimetière, David Fathi a renoncé à aller jusqu’au bout, ne voulant pas être un prédateur blanc de plus dans cette histoire.

Alain Fleisher, L’Apparition du Monstre

L’exposition Le Rêve des formes, au Palais de Tokyo (jusqu’au 10 septembre) explore les relations entre art et science : comme souvent avec Le Fresnoy (qui a organisé l’exposition) la science ou la technique étouffent quelque peu la création artistique et on se trouve en face de pièces très savantes, difficiles à expliquer à qui n’a pas fait Polytechnique (selon la formule consacrée), mais d’un assez faible intérêt esthétique. Parmi les heureuses exceptions, il y a bien sûr une vidéo d’Alain Fleisher qui, constatant un jour une croissance anormale de son cactus, décida de la modéliser, de l’étendre et d’appliquer ce modèle de croissance visuelle cancéreuse à une tour, à un serpent et à un fauteuil, qui se multiplient à l’infini.

Exploit à paillettes (Abraham Poincheval)

Abraham Poincheval sortant de sa Pierre au palais de Tokyo le 1er mars 2017 après une semaine à l’intérieur, photo Joël Saget AFP

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Quand j’étais enfant, un funambule nommé Henry’s passait des jours, des semaines, des mois sur un fil au dessus d’immeubles, de canyons, du lac d’un barrage voisin ou du Chaudron vert. Même si son obituaire dans Le Monde fut écrit par la critique danse du quotidien, Henry’s ne se considérait pas comme un artiste, ni comme un performeur, mais il trouvait du plaisir à explorer les limites de ses possibilités physiques et mentales. Voyant au Palais de Tokyo les traces des performances d’Abraham Poincheval, qui, lui, s’affirme clairement comme un artiste en passant quelques jours dans un rocher (ci-dessus une image de sa sortie dudit rocher, au PalTok), dans un ours empaillé (ci-dessous, au Musée de la Chasse) ou au sommet d’une colonne, je tente de saisir la différence entre les exploits non-artistiques d’Henry’s (indépendamment du fait qu’ils étaient plus sportifs et plus longs) et les performances artistiques de Poincheval.

Abraham Poincheval, Dans la peau de l’ours, Musée de la Chasse et de la Nature, 2014, photo Sophie Lloyd

En fait, pour la plupart de ses performances statiques, c’est, me semble-t-il le discours plutôt que l’action qui fait la différence, discours de l’artiste et discours des commissaires. Si Henry’s n’était qu’une attraction amusante mais qui éveillait l’admiration de par son excès, Poincheval est un élément bien conscient et bien articulé de la société du spectacle. Diplômé des beaux-arts, il a soin d’introduire des références esthétiques et littéraires (Candide de Voltaire, Toine de Maupassant,..), d’articuler philosophiquement son « exploration de la nature humaine », son « expérimentation de la temporalité minérale ». Et ces exploits médiatisés, avatars artistiques de Koh-Lanta, plaisent beaucoup.

Abraham Poincheval et Laurent Tixador, L’inconnu des grands horizons, 2002

Plus qu’à ces spectacles mis en scène au Palais de Tokyo, au Musée de la Chasse, lors de la Nuit Blanche ou dans des FRAC ou des centres d’art, je suis en fait bien plus sensible à ses performances itinérantes, aux explorations du territoire qu’il fit avec son ex-complice Laurent Tixador, dont, par ailleurs, la réflexion sur la performance me paraît plus élaborée et moins séductrice. Ainsi, leur marche à la boussole pour ne pas dévier de la ligne droite entre Nantes et Caen, puis Caen et Metz me séduit non par « l’exploit » ainsi accompli, somme toute assez simple, que par la dimension protocolaire rigoureuse qui la construit, cette application d’un principe mental, mathématique à un espace naturel, géographique qui s’y oppose. Pas d’interaction amusante avec le spectateur (« et comment faites-vous pipi dans votre pierre ? »), mais une rigueur éthique et contraignante, loin du monde et de ses paillettes.

[20 mars : un commentateur ci-dessous me signale ce travail de Timm Ulrichs, datant de 1978/80 à Norhorn; mais Ulrichs n’est resté que dix heures. Nombreuses photos. Cet article fait la « comparaison »]

Marie Mathématique et le cyber-prétexte

Marie Mathématique

Marie Mathématique

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L’exposition  » Sous le regard de machines pleines d’amour et de grâce « , au Palais de Tokyo jusqu’au 8 Mai) doit, si j’ai bien compris, montrer les rapports entre art et machines cybernétiques, comme nous y invite le poème de Richard Brautigan qui a inspiré son titre. Et, comme souvent en ces lieux, on peine à discerner le lien, même ténu, entre le propos du commissaire et les œuvres présentées. Certes, les lampes-chaises suspendues de Mika Tajima voient leur intensité lumineuse varier en fonction de l’humeur du web, à partir d’algorithmes mesurant les sentiments positifs ou négatifs sur Facebook ou Twitter, ce qui n’est pas d’une originalité folle.

Marie Lund, STILLS,2015-2017

Marie Lund, STILLS,2015-2017

J’ai bien aimé la série de toiles décolorées de Marie Lund, stores soumis au soleil et aux intempéries et perdant plus ou moins leur couleur, comme des empreintes photographiques ; elle les conjugue avec des moulages en béton de jambes de jeans et des agrandissements en cuivre d’objets quotidiens, un ensemble assez réussi sur la matérialité, mais quel rapport avec les machines et la cybernétique ? De même, les froides installations de Lee Kit, de Pedro Barateiro (toujours obsédé par les palmiers malades) et de Michael E. Smith, si elles témoignent du minimalisme janséniste à la mode, n’apportent pas grand-chose au propos, non plus que le triptyque vidéo disneyen d’Isabelle Cornaro. Par contre, Marjorie Keller avait réalisé un inventaire de sa maison de famille pour l’assurance, et sa vidéo nous montre chacun de ces objets, unique et magnifié au moment où la caméra le capte, puis retombant dans l’ombre, cependant que les voix de la famille forment un fond sonore. Sans l’esprit méthodique et catalogueur d’un Christian Boltanski ou d’une Ana Pérez-Quiroga, cet étrange inventaire mélancolique transforme les objets quotidiens en fantômes auratiques. Certes, il est toujours question d’objets, mais on est loin des cyber-prairies, cyber-forêts et cyber-écologie du poème de Brautigan.

Marie Mathématique

Marie Mathématique

Mais rien n’est perdu car il nous reste Marie Mathématique, première héroïne TV de science-fiction, petite sœur de Barbarella, qui, dans sa courte vie de 36 minutes en six épisodes de l’émission Dim Dam Dom, entre octobre 1965 et avril 1966 (non, je ne l’ai pas vue alors, je préparais mes concours en pensionnat…) apporta une fraîcheur, une poésie et un érotisme des plus agréables : l’histoire se passe en 2830, et cette jeune fille de bonne famille et de grande beauté adopte des animaux galactiques, est reçue par la reine de Vénus, dont elle câline le fils, rencontre des Karkafouille et des Péronnelle des Bois, qui m’évoquent Georges Hugnet, et répand le bonheur dans l’univers. Vu sa beauté, un tas de briques en folie qui semait la terreur dans la Drôme s’éprend d’elle et la couvre de caresses (de briques), mais elle tombe amoureuse d’un motard voyou en blouson de cuir, pour qui, dans la scène finale, elle dénude enfin son corps parfait, et plus.

Marie Mathématique

Marie Mathématique

Installez-vous devant cet écran (rien pour s’asseoir) et dégustez pendant ces courtes 36 minutes les textes en virelai d’André Ruellan, susurrés fort érotiquement par Serge Gainsbourg, et ponctués d’un rire de bécasse absolument parfait. Dessins de Jean-Claude Forest (l’auteur de Barbarella), réalisation de Jacques Ansan, et, parmi les présentatrices de chaque épisode, j’ai cru reconnaître France Gall (mais toutes les jolies filles avaient une frange ces années-là). En fait de machines pleines d’amour et de grâce, nous voilà enfin comblés !

Mel O'Callaghan,, Dangerous on-the way, 2016

Mel O’Callaghan,, Dangerous on-the way, 2016

Un peu plus loin, l’exposition de l’Australienne Mel O’Callaghan se déroule en trois volets : une estrade avec un gong, un sistre, du bois calciné et un bol d’eau géant, où se déroulent des performances (que je n’ai pas vues) mais où on sent néanmoins une spiritualité discrète, les traces invisibles des transes passées peut-être ; un grand écran vidéo où elle présente son film sur des hommes de Bornéo qui, pour récolter des nids de salanganes (plat fort recherché parait-il), construisent d’immenses échafaudages brinquebalants dans une grotte gigantesque : c’est un film plein de bruit et de lumière, qui tente de nous faire partager l’effroi et l’extase de ces hommes audacieux, sans prétention ethnographique (aux antipodes du travail de Camille Henrot, par exemple). Et enfin une troisième salle de décompression, avec des chicanes de sculptures géométriques blanches : on y perçoit encore les sons du film, mais peu à peu notre esprit s’apaise, notre pouls ralentit. Ce travail sur le rituel est très réussi, et la manière dont l’artiste nous fait l’aborder est brillante. Enfin, je vous parlerai un autre jour d’Abraham Poincheval.

Photos 2 & 5 courtesy du Palais de Tokyo; photos 1 & 3 INA; photo 4 de l’auteur.

Clé de Saulnier

Emmanuel Saulnier, Black Dancing, vue d'exposition 2017

Emmanuel Saulnier, Black Dancing, vue d’exposition 2017

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Toute l’exposition d’Emmanuel Saulnier au Palais de Tokyo (jusqu’au 8 Mai), même si elle est silencieuse, à part le crissement de nos pas sur le macadam, est sous le signe de la musique ; elle est titrée Black Dancing. À l’entrée, neuf grands tubes de verre, remplis d’eau et joints par des agrafes elles aussi en verre, forment une partition silencieuse, qui repose sur un parterre de livres noirs, Condition d’existence, travail de l’artiste autour des Keys (d’où le mauvais jeu de mots du titre…).

Emmanuel Saulnier, Black Dancing, vue d'exposition 2017

Emmanuel Saulnier, Black Dancing, vue d’exposition 2017

Le sol de la salle suivante, dans une demi pénombre, est couvert de débris de macadam noir, au-dessus duquel flottent deux sculptures faites de nasses de pêcheurs, vides, que les déplacements des visiteurs agitent un peu. Leurs ombres décharnées dansent sur les parois. C’est une forme de célébration du vide, de l’absence, du silence. Au mur, des bâtons de verre à peine visibles tracent le mot SORT.

Emmanuel Saulnier, Black Dancing, vue d'exposition 2017

Emmanuel Saulnier, Black Dancing, vue d’exposition 2017

La dernière salle est aussi claire que la précédente était sombre, aussi dispersée qu’elle était ramassée. Des morceaux de bois teintés en noir, durs et compacts, y répondent à la légèreté des nasses, de grandes aiguilles de verre noir fixées au mur et marquant on ne sait quel temps, contrastent avec les ténus bâtons surgissant du mur de la salle précédente. Au lieu de cheminer précautionneusement sur le macadam brisé en s’efforçant d’être aussi léger et discret que possible, on navigue entre les morceaux de bois épars, dont certains grimpent au mur : on est passé d’une petite musique de chambre mélancolique à la partition spatiale d’une improvisation libre de jazz, placée sous le patronage de Thelonious Monk (Round Midnight), pleine d’hésitations et de silences. Ces correspondances musicales, poétiques, sculpturales engagent le spectateur dans l’œuvre, l’amènent à s’y mesurer physiquement.

fauteuil

Je suis toujours surpris de la variété des expositions au Palais de Tokyo et je m’interroge sur les raisons et les influences qui font voisiner le meilleur et le pire, la beauté discrète de Saulnier et le tapage dérisoire de l’exposition à côté, où l’artiste japonais Taro Izumi, entre hurlements de loup, illusions d’optique pour enfants des écoles et dissémination de chaussures surveillée par les gardiens sur des chaises d’arbitre de tennis (le seul élément drôle de l’ensemble) produit un ensemble d’une rare indigence intellectuelle et esthétique, parfaitement emblématique de l’art comme spectacle vain. On peut le traiter de « trickster », de farceur, de fripon, d’enfant terrible, de maître du désordre, ce n’est pas cela qui lui donnera une quelconque densité. Le pire est sans doute sa série de parodies prothétiques, assemblages de meubles et de bouts de bois qui devraient permettre au corps de tout un chacun d’être homothétique à celui d’un sportif en plein élan : cela fait surtout penser à la fameuse chaise d’Edouard VII au bordel Chabanais, et c’est donc la seule image que je trouve adéquate pour illustrer ceci.

Anne Le Troter, Liste à puces, vue d'exposition, 2017

Anne Le Troter, Liste à puces, vue d’exposition, 2017

Dans la même veine, les chaises sauteuses de Dorian Gaudin m’ont laissé tout à fait indifférent, et je n’ai vu dans l’installation d’Emmanuelle Lainé qu’un trompe-l’œil sophistiqué. Dernière pour aujourd’hui (les autres dans un ou deux prochains billets), l’installation d’Anne Le Troter (suite à son Grand Prix à Montrouge pour ses chuchotements) dans la petite salle en forme de théâtre analyse et décortique le langage des vendeurs/enquêteurs par téléphone, prolétariat bien formaté qui se fait le plus souvent raccrocher au nez (par moi, en tout cas), et auquel l’artiste appartint un temps. Le dispositif scénique est pertinent, la langue, rituelle et répétitive, est le moteur principal de cette installation sensible, mais il reste à décrypter de manière plus approfondie les relations de pouvoir sous-jacentes.

Photos 1, 3 & 5 courtesy du Palais de Tokyo; photo 2 de l’auteur.

Le romantisme conceptuel de Charbel-joseph H. Boutros

Charbel-joseph H. Boutros, Mon Amour, 2012

Charbel-joseph H. Boutros, Mon Amour, 2012

Traduction en espagnol

Il a un nom improbable (n’allez pas rajouter une majuscule de trop) et un look d’artiste maudit du XIXe. Il est exposé dans un des modules du Palais de Tokyo (jusqu’au 7 septembre). Il jongle avec des concepts, des protocoles, des absences-présences. Il construit des pièces logiquement absurdes (un centimètre cube de nuit noire enfermé dans un bloc de marbre, un verre avec un mix de 28 eaux minérales provenant de tous les pays de l’Union européenne, un tas de sel et de sucre, un ticket de caisse acrostiche épelant Mon Amour, des téléviseurs montrant le mélange de deux airs « nationaux » à une frontière internationale, etc.) et nous invite à les découvrir joyeusement et crédulement, en entrant dans sa classification (œuvres de nuit, de jour, d’eau,…).

Charbel-joseph H. Boutros, Salt Dream

Charbel-joseph H. Boutros, Dream Salt

Car tout cela est empreint d’une naïveté mélancolique, d’une poésie désarmante, d’un humour quasi potache. Charbel-joseph H. Boutros est un fils de Marcel Duchamp et d’Alphonse Allais qui n’y croirait pas vraiment et ne chercherait pas à nous éblouir, juste à nous faire sourire, et peut-être alors, ensuite, réfléchir un peu. Oui, un enfant de trois ans (très malin) en ferait autant, et c’est bien ce qui fait tout le charme de ce travail, si on veut bien croire les histoires de l’artiste…

Seconde photo de l’auteur

Lamentations

Pyongyang residents cry as they mourn the death of North Korean leader Kim Jong-il at a square on Mansu Hill in Pyongyang. REUTERS/Kyodo

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Les Histoires de fantômes pour grandes personnes de Georges Didi-Huberman au Palais de Tokyo (jusqu’au 7 septembre) font surgir dans nos mémoires l’émotion éternelle des lamentations de tous les temps. On a certes le sentiment de ne saisir que des bribes de la pensée de l’auteur, même si on a lu certains de ses (40) livres ou suivi certains de ses séminaires, et on se sent bien limité face au foisonnement des chemins de pensée ainsi ouverts. Contrairement à son exposition Atlas au Reina Sofia, (puis au ZKM de Karlsruhe)  où on pouvait se sentir submergé, balloté, englouti, désemparé, au point de ne rien pouvoir écrire, cette exposition est plus circonscrite, et même, grâce à la déambulation possible au milieu des projections, plus abordable qu’au Fresnoy. On peut toutefois trouver moins pertinente la revisite de l’exposition Atlas (dans sa troisième version, hambourgeoise) par le biais de tirages sommaires de photographies d’Arno Gissinger, certes perspective intéressante de désacralisation de la photographie, mais d’un intérêt moindre que la célébration de la lamentation proposée ici.

Aby Warburg, Mnemosyne, p. 42

Celle-ci se présente selon deux formats : le premier, vertical, animé par des effets de zoom, reproduit la page 42 de Mnemosyne d’Aby Warburg, livre essentiel, fondateur et dont Didi-Huberman a amplement fait l’exégèse (Mnemosyne, déesse de la mémoire et mère des Muses). Cette page là, projetée sur un écran géant à l’entrée, juxtapose des reproductions de gravures, bas-reliefs et tableaux de lamentations, des Pietà surtout (mais aussi des Dépositions, des Mises au Tombeau et des morts profanes), en noir et blanc, de Donatello et Mantegna à Raphaël. L’animation fait ressortir, émerger, grandir une des 18 images qui vient occuper tout l’écran, puis nous offrir chacun de ces détails. Ce concert de lamentations, silencieux et grandiose, est fort délimité : une époque (de 1440 à 1520), un pays (l’Italie, et surtout Florence et Rome), une religion (la Catholique Apostolique Romaine), un thème (la lamentation). Il a pourtant une universalité latente que la suite de l’exposition va révéler.

 

Dans la partie suivante, la posture du spectateur change, non plus frontale mais verticale : le sol est devenu un montage, une mosaïque de projections. On peut errer au milieu d’elles ou bien prendre du recul et aller sur la coursive pour voir d’en haut chacune des pièces de la mosaïque, la plupart en couleur, souvent sonores, parlées ou musicales : il y a là quelques reproductions de dessins et de tableaux (le Picasso de Guernica, bien sûr, mais aussi Giotto), d’icônes orthodoxes et de vases antiques, mais surtout des photographies, seules (les Communards morts attribués à Disdéri, des photos de presse, en Basilicate ou à Damas) ou en diaporama (ABC de la guerre de Brecht, et la dépouille de la danseuse de flamenco Carmen Amaya, deux sujets de prédilection de Didi-Huberman) et des films. Il s’agit là d’une partie de la bibliothèque de Didi-Huberman : un florilège des lamentations modernes, où le regard et l’esprit tourbillonnent entre Godard (Vivre sa vie), Pasolini (La Rabbia,

Pier Paolo Pasolini, L’évangile selon Saint Mathieu

Médée, L’évangile selon Saint Mathieu), Eisenstein (Potemkine), Paradjanov (Les chevaux de feu), Dreyer (Ordet), Poudovkine (La mère), Rocha (Terre en transe), mais aussi les funérailles de Durruti ou les lamentations au décès de Kim Jong-Il (en haut). Cette permanence du pathos, cette culture de la lamentation à travers les âges, les continents, les cultures et les médiums laissent pantois. Plutôt que des fantômes, ce sont les pleureurs, les abandonnés, les veufs et les orphelins qui se pressent ici.

 

Dans les entrailles du PalTok, Eden

Palais de Tokyo, vue d’exposition, 2012

Une visite au Palais de Tokyo est toujours une étrange aventure, et on ne sait jamais trop comment la narrer : s’il est un endroit où les oeuvres présentées ne peuvent se dissocier de l’environnement dans lequel elles sont, c’est bien là (certes, c’est aussi vrai de Versailles, mais bon…). Le plus fascinant est de réfléchir à la répartition des espaces, depuis la monstration des artistes respectables et arrivés à l’étage d’entrée, belles salles blanches et courbe majestueuse, à la présentation au niveau en-dessous d’artistes peut-être encore en quête de légitimation dans un environnement certes ouvert sur la Seine mais néanmoins déjà un peu brut de décoffrage, jusqu’à la relégation dans le sous-sol labyrinthique, sombre et parfois malodorant, de la ‘jeune scène artistique’ brouillonne et ne demandant qu’à être découverte, et ce, bien sûr, dans un schéma non muséal, non standard.  Ce n’est pas tant, comme l’affirme André Rouillé dans son originale analyse du lieu, une défaite de la pensée et de l’art occidental (rien que ça…) qu’une segmentation maline qui, en haut, favorise la contemplation classique de l’oeuvre et, en bas, propose une expérience sensitive désordonnée et globalisante où l’oeuvre est non pas « engloutie dans l’immensité chaotique et ténébreuse d’un dédale » (pour reprendre ses qualificatifs), mais soumise à d’autres paramètres de vision, d’audition, d’expérimentation (voire de toucher ou d’olfaction…) et plus difficile d’accès, en tout cas d’accès rationnel. Ce n’est pas là le bannissement d’un art mineur, délaissé, occulté, c’est plutôt une perception nouvelle, à inventer, assez similaire, en fait, à ce qu’on trouve dans le bricolage de centres d’art marginaux (et fauchés). [L’oeuvre au premier plan sur la vue d’expo ci-dessus est en effet Le temps de rien, 1985, de Richard Baquié, j’aurais dû le préciser. 14/11].

Ryan Gander, Esperluette, vue d’expo, Palais de Tokyo, 2012

C’est ainsi que, en prélude aux expositions ‘dérives de l’imaginaire‘ (jusqu’au 7 janvier sauf mention contraire), on entre d’abord dans l’univers de Ryan Gander, avec, en particulier, -ce  fauteuil Knoll Eames (voir commentaire ci-dessous de Stéphane Corréard) où, confortablement installé, on regarde passer des objets divers appartenant à l’artiste qui défilent sur un tapis roulant très ‘travelling’, derrière une fenêtre dans le mur, comme une machine à voir. La distance est bien là, entre le spectateur vautré dans son fauteuil, et la bibliothèque d’objets de l’artiste, pas de proximité, pas de complicité, une contemplation mais pas d’expérience, la remise à l’ordre du jour de la fameuse fenêtre ouverte sur le monde d’Alberti.

Raphaël Zarka, Déduction de Brückner, vue d’expo, Palais de Tokyo, 2012

Tout aussi rigoureux est le travail de Raphaël Zarka, simple planche posée contre le mur et  découpée selon des formes géométriques : au premier degré, un objet banal, qui ne s’appréhende qu’en comprenant qu’il s’agit là de la reproduction d’une planche d’un traité de géométrie ancienne, signe de la fascination de l’artiste pour ces jeux de l’esprit, témoin de leur transposition en un objet. Celle-ci se nomme Déduction de Bruckner. Le romancier Pascal ? Le musicien Anton ? Il y a aussi, me dit Wikipedia (recours aisé), un gymnaste est-allemand, un entraîneur de foot tchèque, une actrice américaine et un artiste français. On trouve aussi, en allemand, un officier de la Wehrmacht, des politiciens, un écrivain pour la jeunesse, et en anglais, une autoroute dans le Bronx. Mais c’est un géomètre, un mathématicien, que je cherche, rien de tout ça. Ah, le voilà, Max Brückner. Ce que j’aime chez Raphaël Zarka, c’est que ses oeuvres s’adossent à l’histoire des formes, mathématiques ou artistiques, les utilisant comme un matériau brut plutôt que comme une citation, se positionnant comme une sorte de paratexte de ces formes; son travail ne consiste en fait qu’à mettre en place un système pour générer des pièces, des formes.

Fernand Deligny, vue d’expo, Palais de Tokyo, 2012

Ce n’est pas pour autant que la distance, comme imposée à cet étage, annihile l’émotion : une très belle salle est consacrée à la présentation (sans doute visuellement malaisée) des erres de Fernand Deligny, ces dessins sur papier calque des déplacements des enfants mutiques (autistes, dirait un psychiatre, mais Deligny n’était pas psychiatre) autour du centre de Monoblet, ces traces de vie hors du langage. De ces enfants, on voit ainsi ce qui ne se voit, leurs rituels, leurs enchevêtrements, leurs découvertes. Deligny disait : « et si au lieu d’apprendre à parler, nous apprenions à nous taire ». Il faut passer du temps ici , regarder les vidéos, se promettre de lire ses écrits. Ce ne sont pas tant les objets à voir dans cette salle qui comptent, que l’univers qu’elle ouvre, les chemins à explorer où elle nous entraîne, qui génèrent cette sensation de passage, ce désir d’exploration au-delà de l’image.

Plus bas, bien sûr, la grande serre de Fabrice Hyber, omniprésent cet automne : des plantes, des cabanes de douche (oui, cabane, pas cabine), des Prototypes d’Objets en Fonctionnement, un mètre cube de rouge à lèvres; c’est plutôt mieux vu de la passerelle qui surplombe ces salles, on a ainsi un peu de distance par rapport à ces matières organiques, à cette introduction du vivant, du mouvant, du collant, du mouillant, du polluant, du pollinisant dans le monde froid du musée. A cet étage, on ne contemple pas assis dans un fauteuil, on se salit, on hume, on effleure, et les murs se dégradent. On commence déjà à ne plus trop savoir où on est, ce qu’on voit.

Galerie Utopia, The Forgotten Bar Project, Tjorg Douglas Beer, The Garden of Eden, vue d’expo, Palais de Tokyo, 2012, ph. Aurélien Mole

Un étage plus bas, on arrive au Jardin de l’Eden (jusqu’au 19 novembre), un jardin sombre, désordonné, perturbateur, où on se perd, on se heurte dans l’obscurité à une colonne (ou serait-ce une oeuvre ?). Tjorg Douglas Beer, avec Galerie Utopia, a rassemblé ici une cinquantaine d’artistes, plus bon nombre d’évènements. Ça part dans tous les sens, on ne comprend pas tout, loin de là, mais peu à peu, au milieu de ce chaos, se fait jour une forme d’euphorie, de jubilation face à cette ZAC (zone d’activité artistique),  à ce laboratoire protéiforme et expérimental. Peut-être, comme ils nous y invitent, est-ce le moment de repenser les règles, de ne pas regarder mais de prendre part, d’échanger, de s’aventurer, de se mettre en danger, en porte-à-faux par rapport à nos belles idées reçues. Je ne sais, mais ça me plaît, et ça me tente, de descendre dans l’Eden…

Photos de l’auteur excepté la dernière. Fabrice Hyber étant représenté par l’ADAGP, la photo de son installation a été ôtée du blog à la fin de l’exposition.